Les Linzeler

À l’instar des Marret, plusieurs membres de la famille Linzeler ont œuvré, pendant un siècle dans le monde de la bijouterie, de la joaillerie et de l’orfèvrerie.

Dans son imposant ouvrage sur La bijouterie française au XIXe siècle qu’il publie en 1908, Henri Vever, raconte l’histoire des Linzeler :

Le nom de Linzeler est estimé depuis longtemps dans la corporation et, coïncidence curieuse, il se trouva trois frères exerçant la même profession. Nous trouvons le premier ainsi désigné dans l’Azur de 1833. « Linzeler aîné, rue Saint-Honoré, 396, orfèvre-joaillier-bijoutier, tient le change des monnaies »; le second, Charles Linzeler, rue de l’Ancienne-Comédie, 5, « joaillier-bijoutier, tient la curiosité »; enfin, le troisième, Eugène Linzeler père, avait fondé en 1840, avec Laurent, rue Coq-Héron, nº 9, une fabrique de « bijoutier-garnisseur » (flacons, nécessaires, etc.).

Ernest Linzeler père (1808-1888) était un graveur-ciseleur, ayant travaillé antérieurement chez Joseph Legrand. Il était en relation d’affaires suivies avec un bijoutier nommé Chanrolli qui avait une petite boutique, boulevard de la Madeleine, 11. Ce dernier n’ayant pas réussi, Eugène Linzeler, pour rentrer dans l’argent qui lui était dû, reprit, en 1845, la boutique de son débiteur et y transporta sa maison; il ne tarda pas à lui donner plus d’importance en y adjoignant aussi la bijouterie et la joaillerie. Eugène Linzeler père avait épousé la fille d’un M. Laurent, qui n’avait aucun lien de parenté avec son ex-associé, et qui tenait un magasin de cannes et parapluies connu sous le nom de Verdier. Très fréquenté par les élégants, ce magasin, situé d’abord 102, rue Richelieu, fut transféré, vers 1862, boulevard de la Madeleine, à quelques pas de celui de Linzeler.

En 1864, Eugène Linzeler père s’associa ses deux fils aînés : Eugène (1834-1898) et Frédéric (1836), puis, un peu plus tard, son troisième fils, Albert (1844-1907). Le dernier, Georges (1853), dirigea quelque temps la maison avec son frère aîné Eugène, dont il prit ensuite le fils, Ernest (1865), qui devint son associé. Tous deux sont encore aujourd’hui à la tête de cette maison de joaillerie d’une excellente réputation.

Eugène Linzeler père, ainsi du reste que tous les membres de sa famille, fut très apprécié de ses confrères. Trésorier très dévoué de la Chambre syndicale pendant de nombreuses années, il reçut l’honorariat en 1883, au moment où il quitta les affaires; ses fils y remplirent aussi, à plusieurs reprises, les fonctions de secrétaires et de membres du conseil. Frédéric Linzeler, le sympathique vice-président de la Fraternelle, est le père de Robert Linzeler, l’orfèvre érudit, au goût très sûr, dont les productions sont appréciées par une clientèle d’élite.

Il est toujours difficile d’établir l’histoire de tous et chacun des Linzeler dans le monde de la bijouterie, de la joaillerie et de l’orfèvrerie; plusieurs portent les mêmes prénoms et ces derniers ne sont pas toujours précisés dans les annuaires ou les autres documents…

Les Linzeler de la première génération ont d’abord œuvré individuellement et l’on trouve leur trace dans les annuaires de l’époque :

  • Charles Auguste Linzeler, appelé Linzeler aîné, apparaît dès 1827 dans l’Almanach du commerce de Paris, des départemens de la France comme joaillier, bijoutier et changeur de monnaies, au 396, rue Saint-Honoré (1er).
  • Louis Omer Linzeler, opère, à peu près à la même époque, comme gainier-garnisseur, au 5 de la galerie Vivienne – c’est ainsi qu’il s’annonce dans le Répertoire du commerce de Paris, en 1929. Quelques années plus tard, il déménage à Genève.
  • Charles Tranquille Prosper Linzeler est inscrit en 1840, dans l’Annuaire général du commerce, judiciaire et administratif, comme orfèvre-bijoutier, au 5 de la rue de l’Ancienne-Comédie (6e). Une dizaine d’années plus tard, il opère, à la même adresse,  une boutique À l’épi de diamant et annonce – dans l’Annuaire général du commerce et de l’industrie, en 1940 – le détail de ses activités : « achète les diamants, perles fines et les pierres précieuses, tient les curiosités et les porcelaines d’anciens Sèvres. » La maison sera reprise, vers 1860 par un certain Legendre.
  • Eugène Étienne Denis Auguste Linzeler s’installe au 9 de la rue du Coq Héron (1er) et y travaille comme graveur sur bijoux, si l’on se fie à l’Annuaire général du commerce, judiciaire et administratif de 1839.

C’est ce dernier que l’on retrouve associé avec ses fils Eugène Jean Frédéric et Henri Frédéric dans la société Linzeler père et fils, à partir du 1er août 1864, au 15, boulevard de la Madeleine (8e).

Après le départ du père, cette société devient la maison Linzeler frères et un autre d’entre eux, Charles Albert Linzeler, s’y joint à partir du 1er juillet 1874. La société sera dissoute en 1889.

Quelques réalisations de la Maison Linzeler frères

À la troisième génération, Ernest Linzeler, le fils d’Eugène Jean Frédéric Linzeler, travaille aussi comme bijoutier-joaillier, d’abord associé avec son oncle, Georges Louis Charles Linzeler, puis à son propre compte.

Mais ce sera surtout Robert Linzeler, le fils d’Henri Frédéric qui fera la réputation de la famille pendant près d’une trentaine d’années, tant par sa créativité que par les prix qu’il remporte…